Le fils du pauvre
Le fils du pauvre (extrait)
Tout occupé à ses études, Fouroulou ignorait le drame de sa famille. A seize ans, il avait conscience de jouer son avenir sur des théorèmes de géométrie et des équations d’algèbre alors que ses camarades s’inquiétaient de leur toilette et rêvaient aux jeunes filles.
Fouroulou était susceptible et rancunier. Il en voulait à tous ceux de son village qui refusaient de le prendre au sérieux et qui riaient de la naïveté des Menrad. Au début de sa deuxième année de collège, après une excellente première année, il faillit tout lâcher. La bourse n’avait pas été renouvelée, on ne savait pourquoi le Directeur attendit un mois, deux mois. Fin décembre, ne voyant rien venir, il avertit les boursiers qui durent s’en retourner dans leurs villages tristement. Ce fut un deuil dans la maison des Menrad. Il n’était plus question de trouver encore de l’argent pour continuer à le maintenir à l’école. Cette pensée n’effleura personne. Ils savaient tous que Fouroulou resterait avec eux, qu’il redeviendrait berger.
Mouloud FERAOUN