Les trois mousquetaires (extrait)

Publié le par L'Hocine M.Anis

Les trois mousquetaires (extrait)

 

 

-         Parlez, madame ; parlez ; reine, dit Buckingham ; la douceur de votre voix couvre la dureté de vos paroles. Vous parlez de sacrilège ! mais le sacrilège est dans la séparation des cœurs que  Dieu avait formés l’un pour l’autre.

-         Milord, s’écria la reine, vous oubliez que je ne vous ai jamais dit que je vous aimais.

-         Mais vous ne m’avez jamais dit non plus que vous m’aimiez point ; et vraiment, me dire de semblables paroles, ce serait de la part de Votre Majesté une trop grande ingratitude. Car, dits-moi, ou trouvez-vous un amour pareil au mien, un amour que ni le temps, ni l’absence, ni le désespoir ne peuvent éteindre ; un amour qui se contente d’un ruban égaré, d’un regard perdu, d’une parole échappée ?

«  Il y a trois ans, madame que je vous ai vu pour la première fois, et depuis trois ans je vous aime ainsi ».

« Voulez-vous que je vos dise comment vous étiez vêtue la première fois que je vous vis, voulez-vous que je détaille chacun des ornements de votre toilette ? … »

« Oh ! tenez, tenez, je ferme les yeux, et je vous vois telle que vous étiez alors ; je les rouvre, et je vous vois telle que vous êtes maintenant, c'est-à-dire cent fois plus belle encore ! »

… quelle folie de nourrir une passion inutile avec de pareils souvenirs !

-         Et avec quoi voulez-vous donc que je vive ? je n’ai que des souvenirs, moi. C’est mon bonheur, mon trésor, mon espérance. Chaque fois que je vous vois c’est un diamant de plus que je renferme dans l’écrin de mon cœur

-         … Oh ! parlons-en, au contraire, madame, parlons-en : c’est la soirée heureuse et rayonnante de ma vie. Vous rappelez-vous la belle nuit qu’il faisait ? comme l’air était doux et parfumé, comme le ciel était bleu et tout émaillé d’étoiles !...

-         Oh ! Reine, reine ! Oh ! Vous ne savez pas tout ce qu’il y a de félicités du ciel, de joies du paradis enfermées dans un moment pareil. Tenez, mes biens, ma fortune, ma gloire, tout ce qu’il me reste de jours à vivre, pour un pareil instant …

 

 

Alexandre DUMAS

 

 

Publié dans livres

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