le serpent et la lime
Le serpent et la lime
On conte qu’un serpent voisin d’un horloger
(C’était pour l’horloger un mauvais voisinage)
Entra dans sa boutique et cherchant à manger
N’y rencontra pour tout potage
Qu’une lime d’acier qu’il se mit à ronger
Cette lime lui dit, sans se mettre en colère
Pauvre ignorant ! Et que prétends tu faire ?
Tu te prends à plus dur que toi
Petit serpent à tête folle,
Plutôt que d’emporter de moi
Seulement le quart d’une obole,
Tu te romprais toutes les dents
Je ne crains que celle du temps
Ceci s’adresse à vous, esprits du dernier ordre
Qui n’étant bons à rien cherchez surtout à mordre
Vous vous tourmentez vainement
Croyez vous que vos dents impriment leurs otages
Sur tant de beaux ouvrages ?
Ils sont pour vous d’airain, d’acier, de diamant
Jean de la Fontaine