L'ile
L’ile (extrait)
Le géologue, solennel, se lève et annonce, de sa voix haut perchée :
« Nous écoutons maintenant Alexandre Petit fils de Claude Petit et petit fils de l’Ancien Charles Petit. Quel métier désires-tu exercer dans le village ?
-Pour servir mon village, je demande un emploi chez Pascal robert le géologue.
-Moi Pascal Robert, accepte ta requête. Tu travailleras dès demain chez moi, du matin au soir tous les jours sauf un par semaine, et aura en échange le droit d’exercer mon métier après trois ans. »
Un murmure étonné parcourt la foule. D’habitude, la durée d’apprentissage est de deux ans, afin que le jeune promu puise quitter rapidement ses parents et fonder son propre foyer. Comme je ne proteste pas, il continue :
« As-tu choisi une épouse ?
-Oui. »
Le géologue lève les sourcils un peu étonné.
-Qui est-ce ?
-Katrina Volodiev, fille d’Alexis Volodiev Ancien, veuve du chasseur Antoine Skoupinos.
-As-tu son accord ?
-Non
-Que l’on appelle ici Katrina Volodiev ! »
Kina sort lentement de la foule et vient se placer devant le podium, juste au dessous de moi. En la voyant, j’ai de nouveau cette drole d’impression dans la poitrine, comme si un liquide chaud et amer s’y répandait.
Elle est drapée dans de longues bandes de tissus multicolores, toutes serrées à la taille par un cordon argenté. Sa belle chevelure noire est nouée en une longue tresse qui s’entortille sur son épaule. Elle se tient droite, souriante mais nerveuse devant le ragard dédaigneux des autres femmes.
« Katrina Volodiev, tu as entendu la requete d’Alexandre Petit. Tu sais qu’en vertu des lois du village il doit épouser une fille de son age avant une femme plus agée. Acceptes-tu, sachant que le Conseil peut et doit s’opposer à ce mariage ? »
Des cris isolés fusent de la foule, lui enjoignant de refuser. Les sept filles de la promotion qui n’ont pas encore été choisies font la moue, surtout la petite fille de Mitia.
« Oui ». répond Kina.
Le silence est total. Le géologue se lève.
« Tu sais que, si ce choix est contesté, tu devras accepter un mari d’office ?
-Je le sais.