la lionne et l'ours

Publié le par L'Hocine M.Anis

La Lionne et l’Ourse

 

Mère Lionne avait perdu son faon.
Un chasseur l’avait pris. La pauvre infortunée
Poussait un tel rugissement
Que toute la Forêt était importunée.
5La nuit si son obscurité,
Son silence et ses autres charmes,
De la Reine des bois n’arrêtait les vacarmes.
Nul animal n’était du sommeil visité.
L’Ourse enfin lui dit : « Ma commère,
10Un mot sans plus ; tous les enfants
Qui sont passés entre vos dents,
N’avaient-ils ni père ni mère ?
— Ils en avaient. — S’il est ainsi,
Et qu’aucun de leur mort n’ait nos têtes rompues,
15Si tant de mères se sont tues,
Que ne vous taisez-vous aussi ?
— Moi me taire ! Moi, malheureuse !
Ah j’ai perdu mon fils ! Il me faudra traîner
Une vieillesse douloureuse.
20— Dites-moi, qui vous force à vous y condamner ?
— Hélas ! C’est le Destin qui me hait. » Ces paroles
Ont été de tout temps en la bouche de tous.
Misérables humains, ceci s’adresse à vous :
Je n’entends résonner que des plaintes frivoles.
25Quiconque en pareil cas se croit haï des Cieux,
Qu’il considère Hécube, il rendra grâce aux Dieux.

 

Jean de la Fontaine

Publié dans livres

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